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Giza, la reine noire de Laïkipia

  • aetiennephotos
  • 18 oct.
  • 4 min de lecture

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Depuis qu’elle est devenue célèbre dans les médias, sublimée par le talent de Will Burrard Lucas, de Kyriakos Kaziras, de Valentin Lavis ou de Rajarshi Banerji, j’avais, au fond de moi, le désir feutré d’admirer sa silhouette ombreuse se mouvant silencieusement dans la lointaine Afrique. Mais ce rêve ne serait sans doute jamais devenu une réalité sans l’invitation de Benoit Feron, il y a déjà un an et demi, au détour d’un stand de Spotnature. Sa question était simple : « Pourquoi ne pas partager avec Anne-Françoise et moi un séjour à 4 à sa recherche, sous la houlette de Valentin ? » La réponse fut simple aussi, après un échange de regards avec Serge : « Oui ! ».

 

Qu’elle est belle, fascinante et envoûtante ! L’avoir vue dans son milieu naturel est un immense privilège, un cadeau précieux que je savoure à nouveau, de retour en France en découvrant mes photographies sur l’écran de l’ordinateur.

 

Son ombre sinueuse, la flamme ambrée de son regard, son pelage de noir velours, sa grâce cimmérienne sont inoubliables. Et pourtant, je garde de ces moments partagés avec elle des sentiments doux-amers et de sombres inquiétudes pour son avenir.

 

Permettez-moi, si vous m’avez suivie jusqu’ici, de m’expliquer et pour celà, de décrire son environnement. Les léopards sont des animaux territoriaux et Giza ne fait pas exception à la règle. Le domaine de la reine noire fait fi des limites posées par les hommes et s’étend, principalement sur la concession de Wilderness Laïkipia (Ol Doinyo Conservancy) et sur Mpala Ranch. Son royaume est difficile à atteindre, après environ 2 heures de pistes défoncées depuis la ville la plus proche, Nanyuki. Il est splendide, s’allongeant le long de la rivière Ewaso Narok, au centre du plateau de Laïkipia, à environ 1500 m d’altitude.

 

Les règles pour observer et photographier Giza édictée par Wilderness Laïkipia sont très strictes, dans le but de la protéger. Je cite : « Nous limitons le nombre de véhicules lors d'une observation et le temps passé avec le léopard. Ceux ayant un véhicule privé Black Leopard (BLPV) ou un véhicule partagé Black Leopard (BLSV) se verront attribuer l'un des créneaux prioritaires lors des observations… Les photographes individuels sont encouragés à utiliser le BLSV. Veuillez noter que toutes les sorties axées sur le léopard noir seront limitées entre 6 h et 20 h respectivement, afin de permettre au léopard d'être un léopard. Les projecteurs ont également été équipés de filtres rouges. En cas de signes de stress, votre guide a le droit de mettre fin à une observation à tout moment. Veuillez respecter le léopard lors de toutes les observations. » Et je peux témoigner que notre ranger-guide, Simon, les appliquait avec le souci constant du bien-être de l’animal ; et que le propriétaire, un des guides les plus renommés d’Afrique, Steve Carey, est très vigilant à ce sujet.

La plupart du temps, Giza pénètre dans la concession quand la nuit tombe, pour chasser les dik-diks, ce qu’elle fait avec une maestria impressionnante. Toutes lumières éteintes, seul le « Crouiiikkkk » du petit animal qui meurt nous signale sa chasse victorieuse. Dans la journée, Giza reste dans la partie de son royaume située sur l’emprise de Mpala Ranch.

Sur le site internet de Mpala Ranch, une propriété dédiée à la recherche, on lit : « La mission institutionnelle de Mpala est de soutenir la recherche qui améliore les fonctions des écosystèmes, conserve la biodiversité et améliore les moyens de subsistance des employés et de leurs familles, qui sont principalement des pasteurs traditionnels. En lien avec cette mission, Mpala s'efforce d'avancer la compréhension et la conservation des écosystèmes naturels occupés par l'homme à travers la recherche fondamentale, l'éducation, la sensibilisation, et en créant de nouvelles connaissances scientifiques et en développant des solutions basées sur la science pour guider les actions de conservation au bénéfice de la nature et du bien-être humain ». C’est très beau, plein de grandes idées, et l’interdiction aux véhicules de pénétrer dans la propriété avait fait de Mpala un hâvre de tranquillité pour Giza. C’est là qu’elle a mis bas et que se cantonnent ses deux adorables petits léopards.

Mais les coupures drastiques pour USAID décidées par Donald Trump sont passées par là. Le centre de recherche était largement dépendant de l’aide américaine et la décision a été prise, il y a environ un mois, pour trouver de nouvelles sources de financement, d’ouvrir le ranch aux véhicules désirant voir et photographier la belle chatte noire contre un droit d'entrée d'environ 70€/demi-journée. Une chance pour nous, mais une catastrophe annoncée pour Giza. Les véhicules venus de Wilderness Laïkipia continuent de respecter le même code de bonne conduite : nombre limité àdeux 4x4 autorisés à pénétrer simultanément dans le ranch, une seule demi-journée de présence journalière près de Giza. Mais des véhicules viennent de partout ! Des voitures privées en provenance de Nanyuki, cahotent sur les pistes, s’approchent indument des jeunes, font du bruit sans aucun respect pour la faune. Avec les téléphones portables, il faut s’approcher au plus près pour arriver à obtenir une photo potable. Les lodges situés au loin se frottent les mains. Qu’importe que leurs 4x4 soient vétustes, polluants et bruyants. Qu’importe d’infliger aux clients plus d’une heure de pistes défoncées. Il s’agit de faire découvrir au plus bas prix la splendide reine d'ébène, qui devient un objet de consommation, une attraction de foire. Je les ai vu cracher une fumée noire nauséabonde directement sur elle, l’enveloppant d’un nuage de pollution funeste, au mépris total de son bien-être, dans le simple but d’être au plus près pour permettre au photographe de réussir « le cliché », celui qui obtiendra le plus de likes sur les réseaux sociaux. Ce n’est plus de l’observation, mais du harcèlement !

Giza est belle, fascinante et envoûtante… C’est une mère efficace et dévouée, un animal iconique, la réincarnation de nos rêves d’enfants, une Bagheera en majesté. Quel sera son avenir si une réglementation efficace n’est pas édictée rapidement pour la protéger ? Bagheera symbolise la sagesse et le pouvoir. Sa nature protectrice a fait d’elle un symbole de la loyauté et de l'amitié. Elle incarne également l'idée que la véritable force réside dans la compréhension et le respect de la nature. Suivons ses enseignements. Dans Le livre de la Jungle, ses conseils avisés ont permis à Mowgli de comprendre et de maîtriser ses propres instincts et son identité. Puisse Giza ne pas succomber de trop lui ressembler…

Lady Giza, je vous admire !

 

 

 

 

 
 
 

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