Entre deux mondes - Les Sans du Kalahari

J’ai découvert le peuple San avec le film de Jamie Uys « Les Dieux sont tombés sur la tête ». Livres, récits d’explorateurs, articles scientifiques ont nourri mon intérêt pour ce peuple, son histoire et sa culture.
Mais l’origine de ce livre photographique est le choc émotionnel ressenti à la lecture du recueil de Stephen Watson « Le chant des Bushmen /Xam ». A la fin du XIXème siècle, deux linguistes allemands, installés en Afrique du Sud, W.H. Bleek et sa belle-sœur Lucie Lloyd ont recueilli les récits de trois Bushmen, inventant alors les premiers symboles pour retranscrire les différents clics de leur langue. Ce corpus est un témoignage unique sur une culture en voie de disparition. Les poèmes de Stephen Watson, directement inspirés de la collection Bleek et Lloyd, ont traduit avec justesse, simplicité et une grande sensibilité la désespérance d’hommes privés de leur famille, conscients de la lente mais inexorable disparition de leur peuple.
Nos ancêtres ont vécu comme des chasseurs cueilleurs dans la nature pendant des centaines de milliers d’années et l’âge de l’agriculture, les temps modernes ou post-modernes ne sont qu’un bref soupir au regard du souffle long de l’Histoire de l’Homme. Dans le lointain désert du Kalahari, j’ai effectué à la fois un voyage dans le temps et un voyage dans l’espace, peut-être à la recherche de mes propres racines en compagnie du peuple San ... Mais, et je devais le garder en mémoire, ils sont mes contemporains et ont construit leur propre histoire pleine « de bruit et de fureur », de luttes violentes et, plus récemment, de luttes juridiques. Leur histoire est aussi riche d’adaptations aux conditions géopolitiques du moment. Depuis des millénaires les Sans ont été en contact et échangé avec d’autres peuples qui vivaient au sein d’une économie agro-pastorale puis industrielle. Pourtant, ils ont réussi à conserver un mode d’être-au-monde, une culture, une langue en tous points remarquables.